22. Eric GALLARDO - la chronique MyLittleRedCar dans AUTOHEROES #033

"A 4 ans ce n’était pas cette miniature qui j’avais entre les mains une vraie MGB green racing."

Mon Oncle

L’enfance d’Eric Gallardo, fondateur de Lapland Ice Driving, fleure bon la légèreté du film éponyme de Jaques Tati.

Même si mon Oncle était un peu moins rêveur que Monsieur Hulot, je lui dois bien des souvenirs d’enfance, et surtout ma passion pour l’automobile. Le plus anciens d’entre-eux remonte au jour où il m'a amené pour la première fois faire un tour dans sa MGB green racing flambant neuve. Je devais avoir 3 ou 4 ans. A défaut d’être le pilote, je me délectais d’être son passager sur les routes de corniches de la Costa Brava entre Lloret de Mar et Tossa de Mar. Les odeurs de pins et le bleu azur se mêlaient à cette incroyable sensation de liberté et je m’imaginais, cheveux au vent, pouvoir contrôler le bolide. Dès lors, ma seule ambition devint de m’asseoir au volant malgré des jambes trop courtes qui n’atteignaient pas les pédales. Mon Oncle Roger n’en avait sûrement pas conscience mais ces moments hors du temps passés ensemble forgèrent en moi ma véritable passion pour l’automobile.

 Tout comme Monsieur Hulot pour son neveu, mon Oncle stimulait chez moi une sorte d’aptitude à rêver et je souhaite à tous les enfants de connaître un Oncle Roger ! Il a été très présent toute mon enfance et fut mon second père. En tant qu’enfant je n’avais rien à redire de la vie que m’offrait le cocon parental, mais mon oncle me faisait rêver. Pour moi, petit garçon des années 60, son élégance au volant de sa MGB était encore amplifiée par l’aura de son métier de pilote de jets privés. Mon Oncle cumulait tous les atouts du héros moderne. 

Pourtant, au contraire du héros de Tati qui ne manquait pas une occasion de désobéir aux injonctions des parents de son neveu, mon Oncle se rangea de leur côté lorsqu’ils me poussèrent à poursuivre mes études vers l’ingénierie aéronautique, plutôt que de m’encourager à réaliser mon rêve d’enfant : « être pilote de formule 1 ». Ils avaient certainement raison, mais la passion pour l’automobile était déjà trop bien ancrée et même si j’avais rapidement renoncé à devenir pilote de F1, je gardai un pied dans le milieu en choisissant des études d’ingénierie automobile et devins plus tard pilote d’essai en dynamique du véhicule. Je connus dix années extraordinaires dans ce métier dont le point d’orgue furent les campagnes d’essais sur glace chaque année sur le lac Uddjaur en Laponie suédoise

 C’est bien plus tard, en 2006, que, sur la base du savoir acquis sur la glace au cours de ces dix années, j’ai pu y concrétiser mon projet professionnel le plus ultime : permettre à tous les passionnés de pouvoir, dans un paysage à couper le souffle, piloter les plus belles voitures de sport de la planète sur le plus grand centre de pilotage au monde et dans un environnement totalement  sécurisé. Aujourd’hui, je consacre toute ma vie professionnelle à cette fin et même bien au-délà, c’est devenu ma raison d’être. Rien de tout ceci n’existerait si mon Oncle ne m’avait pas insufflé cette passion, et s’il ne m’avait pas aidé comme il m’a aidé lors des premières années d’activité. Je lui dois ce que je suis.

 En Juillet 2019, alors qu’il avait 86 ans, j’avais racheté une MGB Green racing de 1964, parfaitement restaurée, tout spécialement pour la lui offrir. Après l’émotion de la voir, il s’était alors étonné devant la taille de la voiture surgie du passé qu’il imaginait bien plus imposante et plus spacieuse. Il ne m’avait pas échappé que derrière cette réaction toute prosaïque, une sorte de voile avait brouillé son regard, le même qui brouille aujourd’hui le mien en vous racontant cette histoire et en voyant ma miniature en photographie. C’est un bel hommage que je voulais lui faire pour lui témoigner TOUTE ma gratitude… 

 Aujourd’hui, je restaure en état concours La Mercedes 220 S (modèle W111 aux ailes arrières en forme d’ailerons de requin) que mon grand-père avait acheté neuve à ma naissance. Cette voiture n’avait jamais quitté notre famille et mon oncle me l’avait offerte il y a quelques années quand je lui avais parlé de mon souhait de la restaurer « à neuf ». Cette Mercedes est une autre histoire qui me lie à mon oncle car c’était à son volant que mon oncle m’avait appris à conduire alors que je n’avais que 14 ans. Malheureusement, mon Cher Oncle nous a quitté il y a 2 mois et je n’aurais pas eu le plaisir d’aller le voir avec cette mercedes finalisée, mais je suis certain qu’il sera auprès de moi lorsque je ferai les premiers tours de roues et ce sera alors à lui d’être mon copilote.

Eric Gallardo pour MyLittleRedCar

"En arrière plan la silhouette élégante de mon oncle et moi au volant, haut comme trois pommes."

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